mercredi 4 janvier 2017

Les griffes du Tigre


En mars 2016, lors d’un débat télévisé consacré à la guerre contre l'Etat islamique la question fut posée de la suite des opérations après la reprise de Ramadi puis de Palmyre. Je me montrais à l’époque beaucoup plus prudent que ceux qui voyaient un assaut imminent sur Deir ez-Zor et sur Mossoul, ne serait-ce, dans ce dernier cas, que pour offrir une victoire majeure à la fin de Présidence Obama. 

J'avais tort, les exigences politiques l’ont emporté en Irak sur la prudence militaire. Depuis sa prise par l’Etat islamique en juin 2014, Mossoul a toujours été  le centre de gravité des opérations militaires en Irak. Pour les Américains, leader de la coalition formée à ce moment-là et plutôt adeptes de stratégie directe (surtout quand il s’agit de rester le moins possible sur un théâtre), la reconquête de cette grande ville devait être la priorité. Le gouvernement irakien de son côté était plus prudent, considérant les menaces plus immédiates envers Bagdad notamment depuis l’Euphrate, la complexité politique des provinces du nord et aussi la faiblesse des moyens militaires disponibles. En Irak, l’Etat islamique se trouvait entouré des armées du Parti démocratique du Kurdistan (PDK), de l’Union populaire du Kurdistan (UPK), des milices chiites regroupées dans les unités de mobilisation populaire (UMP, Hachd al-Chaabi) et des ministères de l’intérieur et de la défense. Si, après les défaites initiales et avec l’aide de l’Iran et de la Coalition américaine, chacune de ces armées pouvait résister, aucune d’entre elles n'était en mesure de reconquérir le terrain perdu. Tikrit avait bien été reprise en mars 2015 par les UMP mais avec de telles difficultés et de telles conséquences pour les populations, que cela avait plutôt dissuadé de recommencer l'expérience.

En l’absence d’unités de combat terrestres de la coalition, il fallut donc en passer par une nouvelle reconstitution des forces irakiennes régulières. En décembre 2014, le gouvernement américain décidait d’un plan de formation et d’équipement (Iraq Train and Equip Fund, ITEF) de 1,6 milliards de dollars pour un total estimé de 65 000 hommes. Les alliés, dont la France, contribuaient à ce plan avec des équipes de formateurs et la livraison de quelques équipements. Ce plan s’est révélé finalement beaucoup plus long à mettre en oeuvre que prévu et au bout d’un an, le fer de lance de la contre-offensive était constitué par les Forces spéciales irakiennes, élevées au niveau d’une division (la division d'or, au sens strict la 1ère brigade des trois du Couter Terrorisme Service, (CTS) forte en théorie de 13 000 hommes) et constituant un quasi-ministère. Cette unité est une unité d’élite bénéficiant des meilleurs personnels et abondamment équipée de matériels individuels ou de véhicules modernes comme les M-ATV. En deuxième échelon, plusieurs divisions régulières irakiennes comme les 6e, 15e, 16e et 9e blindées ont également été partiellement reformées et rééquipées. Le ministère de l’Intérieur dispose également d’une division d’intervention rapide (RID) ou 5e division, en réalité une unité d’infanterie spécialisée dans le combat urbain. Au total, au bout de deux ans d’effort, on restait loin des 65 000 hommes prévus, et pour une qualité moyenne, hors unités d’élite, encore fragile. Depuis la contre-offensive sur Ramadi en décembre 2015 cette force, en particulier le CTS, est engagée presque sans discontinuer et peine à compenser ses pertes ou même à conserver ses soldats en fin de contrat. On a du mal ainsi à capitaliser et à simplement maintenir une force opérationnelle de 40 à 50 000 hommes. 

C’est donc cet instrument fragile qui a été lancé à l’assaut de Mossoul dès la fin de la conquête de Falloujah, car au sein de la coalition des quatre armées réunies autour de la troisième ville du pays, c’est bien cette force régulière qui a, seule, la charge de s’emparer de ce nouvel objectif. Or, celui-ci est d'une autre ampleur que les combats menés jusque-là.

Sans surprise, l’Etat islamique a profondément organisé la défense de cette ville grande comme cinq fois Paris intramuros. Dans les localités autour de Mossoul, un premier dispositif visait avec quelques équipes légères voire des combattants isolés, à freiner et désorganiser les colonnes adverses. Surtout, à l’intérieur même de la ville, 5 000 combattants (sans certitude) soit 3 à 4 fois plus qu’à Ramadi ou Falloujah, peuvent s'appuyer sur une forte densité de population civile, qui, contrairement à ces deux localités largement désertées, leur sert de bouclier. Ils ont surtout eu le temps de mettre en place un réseau de points d’appui et de tunnels souterrains ou inter-bâtiments qui leur permet de circuler sans être vus, ils ont aussi eu le temps de préparer des centaines de véhicules-suicide qui leur servent de missiles de croisière en appui d’un combat décentralisé « en essaim » très efficace.



Face à cette organisation prévisible, il aurait été logique de faire pénétrer simultanément dans la ville les quatre divisions régulières prévues (CTS, 16e, 9e et RID). Cela n’a pas été le cas. Par optimisme ou désir d’obtenir une victoire rapide, la division CTS a reçu l'ordre de pénétrer dès le 4 novembre dans les faubourgs est de Mossoul. Pendant tout le mois de novembre, la division CTS a progressé de plus en plus méthodiquement, s’efforçant de préserver la population, qui lui a fait bon accueil, et d’étanchéifier son dispositif face aux infiltrations de l’Etat islamique. En pointe du dispositif, les forces spéciales ont cependant du faire face au gros des forces ennemies qui qui ont multiplié les attaques suicides (plusieurs par jour) et les harcèlements. Un bout d’un mois, la division d'or n’a finalement libéré qu’un dixième de la ville au prix de près de 2 000 pertes. La 16e division est venue au nord appuyer les Forces spéciales mais avec peu de forces en première ligne. Deux brigades ont été engagées également au sud-est sous le commandement de la 9e division blindée. Ne possédant pas les compétences d’infanterie des Forces spéciales, la 9e division a été lancée le 4 décembre dans un raid en direction de l’hôpital Salaam, point d’appui de l’Etat islamique près de l’Euphrate. Le 6 décembre, une colonne de la division atteignait bien l’hôpital mais tombait dans une grande embuscade, encerclée par des sections infiltrées de l’Etat islamique. Une centaine de soldats ont été tués et des dizaines de véhicules détruits. Il a fallu l’intervention d’avions de la coalition sur l’hôpital (sans présence de civils) et des Forces spéciales pour sauver la 9e division en repli. Les 4 000 hommes de la division d’intervention rapide de la police, qui devaient être engagés au sud-ouest sur l’aéroport sont envoyés en renfort à l’est. Le terrain perdu est en partie regagné puis les opérations sont stoppées à la mi-décembre avant de reprendre dix jours plus tard.

La situation est désormais bloquée et c’est une mauvaise surprise. Je pensais pour ma part que l’offensive était prématurée, qu’il aurait fallu disposer d’un meilleur rapport de forces en troupes compétentes et avoir nettoyé la poche de Hawija entre Mossoul et Bagdad. J’estimais cependant que les forces irakiennes seraient capables d’atteindre le centre de la ville à la fin novembre avant de mener un combat de nettoyage pendant plusieurs mois. Les forces irakiennes, hors de la division d’or qui avaient assumé la majeure partie des combats de Ramadi et Falloujah, étaient plus faibles que je ne le pensais et en plus, elles étaient mal coordonnées.

Alors que plusieurs centaines de milliers de civils sont encore présents, l’Etat islamique conserve encore au moins 70 % de ces forces et le centre-ville est encore plus facile à défendre que la périphérie. Les gains en prestige de la résistance héroïque commencent à compenser la perte, inéluctable, de Mossoul. L’Etat islamique, qui est encore moins inquiété du côté de Raqqa malgré, là encore, une offensive lancée à grands renforts de communiqués début novembre, conserve des capacités d’action comme en témoignent la reprise de Palmyre et les attaques sur Bagdad.

Débloquer la situation implique maintenant de changer le rapport de forces. Les marges de manœuvre de l’armée régulière sont limitées. La 15e division, présente à l’ouest de Mossoul est disponible, au risque de laisser les UMP s’emparer de la ville de Tal Afar, et la 16e division a encore été peu engagée. Cela risque d'être insuffisant. Il est possible de faire venir encore quelques unités en provenance de Bagdad mais au risque de dégarnir la capitale et l’Euphrate face aux possibles retours offensifs de l’Etat islamique. La deuxième option est d’engager les UMP dans Mossoul. Le Premier ministre Abadi s’y refusait jusqu’à présent, cantonnant les UMP dans une mission de cloisonnement des abords ouest de la ville mais il subit désormais de fortes pressions pour engager au moins les milices Badr et Kaitaib Hezbollah. 

La troisième option consiste à modifier les règles d’engagement des moyens d’appui feux en particulier ceux de la coalition. Il est difficile d'obtenir des effets tactiques avec des frappes aériennes contre un adversaire retranché dans un milieu urbain complexe surtout si la population civile y est encore présente en nombre et que l'on a le souci de la préserver. Même ainsi et avec l’emploi systématique de munitions aériennes de précision, le site Airwars recense 73 cas de frappes ayant provoqué des pertes civiles en Irak durant le seul mois de novembre (contre, si on veut comparer, 215 en Syrie pour les seuls Russes qui emploient beaucoup moins de munitions guidées et ont moins de scrupules), ce qui en fait déjà à cet égard le mois le plus meurtrier depuis la création de la Coalition. Des règles d’engagement moins restrictives, faciliterait la progression des troupes au sol mais multiplieraient ces pertes civiles. Avec l’engagement de milices chiites, la bataille prendrait un tour beaucoup plus sanglant pour la population et se rapprocherait de ce qui se fait en Syrie. Outre que cela nuirait passablement à l’image de la Coalition, cela engagerait aussi très probablement l’avenir politique de cette région sensible, alors même que les forces régulières se trouveraient affaiblies par rapport aux milices de tous les camps. 


La bataille de Mossoul a été mal engagée. Elle sera gagnée malgré tout mais la manière de parvenir à la victoire influencera fortement l’avenir, alors même que la disparition territoriale de l’Etat islamique est loin d’être achevée et que les causes qui ont provoqué sa renaissance au sein de la population arabe sunnite locale sont encore largement présentes.  

16 commentaires:

  1. Le CTS est un service de taille équivalent à une division qui se subdivise en brigades couvrant tout le territoire irakien et dont seulement 2 (2000 hommes, la culture militaire arabe n'ayant pas du tout la même notion que l'OTAN sur la taille des formations). Leurs pertes sont donc bien inférieures à celles annoncées dans plusieurs médias. Ne pas sombrer à la désinformation de médias locaux autour de cette opération qui, rappelons-le, est également un enjeu de politique intérieure irakienne.

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  2. Plus de la moitié de la population mondiale vivant désormais en ville, et une quarantaine de mégalopoles comptant au moins 10 millions d’habitants, la question s’impose dans toute sa brutalité (en tout cas en occident) : comment éviter les crimes de guerre, lorsque vous avez affaire à une techno-guérilla se mêlant à une population qu’il est inenvisageable d’évacuer ?
    Il est à craindre que les solutions robotisées ou les mille nuances de la poliorcétique soient appliquées, bien avant que d’envisager le traitement des questions de fond, comme le sont par exemple le désœuvrement et la pauvreté de masses de jeunes hommes. S’il n’y a pas de solution politique, il n’y a pas de solution du tout, juste d’interminables conflits dont les métastases poussent jusque dans nos rues.

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  3. Je trouve que la bataille a été bien préparé, car le temps était compté. Plus la coalition aurait attendu et plus l'EI aurait accentué son système de défense, et aurait pu également augmenter la formation des kamikazes, ou du moins, des radicaux prêt au combat.
    -"Des règles d’engagement moins restrictives, faciliterait la progression des troupes au sol mais multiplieraient ces pertes civiles." Et surtout mobiliserait d'avantage de civils contre la coalition, même si pour beaucoup, on ne leur donne pas le choix: L'exécution ou le suicide-bombe, menaçant de surcroit les familles si on ne leur obéit pas. Les civils n'ont donc que la solution de partir discrètement, ou d'obéir à la loi de ceux qui ont le pouvoir sur place, la loi du plus fort en faite.

    C'est à Bagdad de prouver que la sécurité sera assuré dans l'avenir, car les chutes rapide de certaine ville comme Ramadi, a surtout prouvé aux civils que les retournements de situation pouvaient les mettre, du jours au lendemain, dans le mauvais camp.
    Le civil représente la terre glaise, le tour du potier la mécanique de guerre, et les mains du potier la tactique. Tandis que les clients des poteries représentent la stratégie occidental, sunnite, kurde et chiite de ces pays moyen-orientaux en feu. C'était juste une métaphore sur la situation, afin de constater simplement l'ultra sophistication de la coalition, qui se retrouve face à une petite division d'islamistes archaïques et radicalisés... Ce qui est techniquement et tactiquement un comble.

    Pour ma pars je persiste à penser que des troupes occidental aurait pu servir à encercler la ville, afin d'alléger les troupes d'offensives, mais surtout pour ne pas laisser l'impression qu'on est devenu incapable de sacrifice, pour sauver notre nation de l'EI qui nous a déclaré la guerre. On délègue un peu trop les risques à mon avis. On crée ainsi une forme de frustration au sain de nos nouvelles troupes, fraichement engagés pour se battre contre les terroristes.
    On a pas le droit de s'étonner qu'un pays qui a subit des bombardements depuis 1991, soit fragilisé de toutes pars. Alors le mieux pour l'instant, à mon humble avis, c'est de rester positif, et d'essayer que le plus de monde aille dans le même sens, cet-à-dire celui de détruire l'EI, et d'organiser la paix entre les différentes confession d'Irak; mais aussi de Syrie, mais aussi du Yémen, mais aussi de la Libye. Mais le facteur "pétrole", ne cesse de semer le discorde, et c'est à se demander si certaine officine obscure ne profitent pas du chaos pour garder la main.
    Enfin avec quelques réajustements tactiques, sans tomber dans le défaitisme, on devrait arrivé à bout de ces cul-terreux, sans trop de perte dans la coalition, mais surtout chez les civils, car ne l'oublions jamais, la psychologie de ces civils sera toujours déterminante pour préparer la "paix" dans le futur.

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    1. Je pense qu'on va en arriver à une implication beaucoup plus directe des troupes occidentales au sol, au moins pour tenir les zones prises. Une étape importante sera franchie lorsque l'hôpital sud sera coupé du reste de la ville (jonction est-ouest via l'aéroport), manoeuvre qui semble avoir bien avancé hier. Ca devrait permettre d'isoler complètement la partie Est de la ville, de donner du répit aux troupes irakiennes avant d'engager la partie Ouest de la ville d'où l'EI ne pourra pas avoir accès à la partie Est, faute de pont et impossibilité de tunnels et n'aura pas de grande possibilité d'améliorer son dispositif défensif faute de ravitaillement en carburant (et points d'eau... )

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  4. http://www.lopinion.fr/edition/international/mossoul-l-armee-americaine-contrainte-s-impliquer-directement-dans-117310?utm_source=facebook&utm_medium=social&utm_content=divers&utm_campaign=share

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  5. Pour compléter une analyse pertinente https://www.youtube.com/watch?v=VHiUQ8kNkCU#t=69.418319

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  6. Si on établit une comparaison avec la deuxième bataille de Falloujah de novembre 2004 la situation à Mossoul apparaît bien moins favorable.
    A Falloujah ce fut une division de marines us appuyée par des forces irakiennes qui a conduit l'essentiel des opérations.C'était une unité aguerrie avec un armement moderne et homogène, un effectif compris entre 15 et 20000 hommes et une logistique efficace qui avait anticipé les besoins. Il faut également rappeler que la majorité de la population civile avait évacué les lieux. Après la bataille on a estimé les forces ennemies à environ 5000 hommes soit l'équivalent de l'EI à Mossoul.
    Aujourd'hui, les forces irakiennes sont loin d'atteindre ce niveau comme cela est démontré supra, la situation politique du pays est également très différente, enfin la présence d'une importante population augmente grandement les risques de victimes collatérales.
    Dans ce contexte, si les forces US et occidentales ne s'engagent pas davantage, la tache des forces irakiennes va être très difficile, il y a un risque d'enlisement et l'échéance donnée par monsieur Hollande pour la conquête de la ville pourrait apparaître bien optimiste.

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  7. bonjour,
    une remarque sur les renforts possibles à Mossoul. La 7eme division irakienne ( avec pmu et troupes us ) mène une offensive sur l'Euphrate ( ana, rawa, al qaim) ce qui a degarni la troupe à bagdad et hawija.
    lundi 2, daesh a attaqué bajii et s'est emparé de vehicules, armes et munitions ( 16 morts irakiens )
    Les renforts sont arrivés bien trop tard.
    Autour de Mossoul les forces irakiennes sont fixées sur des bastions de daesh ( comme tal keppe )
    Je crois que tout ce qu'il est prudent d'envoyer sur Mossoul est déjà sollicité. La petite marge de manœuvre sont les peshmerga kurdes qui peuvent soutenir les forces irakiennes au nord et est de Mossoul au grand déplaisir des turcs.
    votre texte est discuté sur opex 360.
    cordialement


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    1. Quel article de opex360 svp ?

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    2. Attention à ne pas associer les kurdes d'Irak et ceux de syrie et du PKK. Les kurdes d'Irak sont des alliés - de fait- de la Turquie.

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  8. Les autorités politiques de Bagdad pour la reprise de Mossoul, indiquent deux priorités ,une préserver les populations deux éviter la destruction totale des constructions, pour également préserver l'avenir même si aujourd'hui ces autorités laissent un peu de mou sur les appuis, le siège de Mossoul sera long.
    D'autre part la formation et le bon équipement par les occidentaux des unités de pointe, comme la CTS semble donner un surcroit d'assurance qui est absolument néfaste contre les combattants vicieux des formations terroristes, phénomène que nous avions déjà connu en 2013 dans les Ifhogas avec les FST.
    Autre problème, les Peshmergas n'ont pas grand chose a gagner dans la reprise de Mossoul, même si cette ville était Kurde par le passé mais implantée en population Arabe Sunnites par Saddam, elle est aujourd'hui, hors d'atteinte politiquement par les Kurdes qui ce sont déjà octroyé Kirkouk,n'ayant plus tellement d'espace vital a reconquérir, je trouve qu'il reste plus que sage dans la bataille.
    En Syrie les forces Kurdes du Rojava participe au siège de Raqqa, ville qui n'est absolument pas une revendication territoriale, mais cette participation conforte leur existenceet leur donne des moyens supplémentaires dans les tractations après les batailles.

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  9. L'Irak a été importante. Elle ne l'est plus. L'Irak est un trou noir politique et militaire, tous investissements financiers ou militaires étant perdus. On a oublié à quel point des gens démoralisés peuvent devenir des boulets, obstacle gigantesque aux espoirs placés en eux à coup de dollar. L'Irak, c'est le néant. Elle est le résultat de l'atonie de tout un peuple traversé de haines raciales, tribales et religieuses, sans oublier les effets délétères de la corruption et la fatigue de la guerre. Le seul lien qui injecte tant bien que mal un peu de modernité est le pétrole et ses revenus. Les responsables américains devraient se rendre compte qu'ils reproduisent en Irak le schéma de la mise sur pied d'une armée Sud-Vietnamienne autonome. On se souvient qu'à part quelques unités, les forces armées se sont effondrées devant l'envahisseur du Nord.

    La portion de Syrie dominée par les Kurdes est à l'opposée. Leur volonté d'endurer toute les souffrances et tous les sacrifices pour obtenir une autonomie qu'ils disent inclusive est impressionnante. Et ils ont compris que le modernisme occidental était la clé de cette liberté. Démocratie, laicité, tolérance envers toutes les religions et ethnies, liberté de la femme, écologie sont des mots d'ordre qu'ils essaient d'implémenter malgré la guerre et le blocus à leurs frontières. Leur troupe composée de fantassins, homme et femme, à armement léger et sans protection individuelle fait des merveilles, s'imposant contre tous ses ennemis: Daesh, pro-turcs, gouvernementaux et bientôt Turcs. Un officier d'Etat-Major aurait tendance à négliger cette armée qui ne semble pas organisée et est souvent dirigée par des femmes jeunes et sans qualités militaires évidentes. C'est oublier l'unité de doctrine et d'idéologie qui les animent et, par conséquent, la discipline sans faille des troupes. La victoire de Manbij, en bien des points exemplaire, a montré que ces chefs autodidactes étaient capables de commander dans la durée des effectifs d'une taille dont un Général français n'oserait plus rêver. L'offensive en direction de la lointaine Raqqa est méthodique et prudente. Comme celle contre Manbij, elle vise à préserver au mieux les civils et à prendre en charge leur sécurité. Pour l'instant, à 40 km de Raqqa et avec 110 villages libérés, c'est un sans faute et sans bavure.
    Ils admettent, pour l'année 2016, avoir perdu 613 hommes et femmes contre 4622 ennemis. Ces chiffres sont les témoins d'une efficacité certaine. Au bout de 5 ans de guerre qui laissent tous les protagonistes exsangues, ils sont les seuls, avec peut-être les Turcs, à s'être renforcès et à faire front sans désemparer. Par souci de complétude, il faut faire référence aux aides de la coalition, soutien aérien et forces spéciales. Les Kurdes reconnaissent l'économie en temps et allègement des pertes que cette aide permet. Mais ils font valoir qu'auparavant ils ont combattu avec succès 2 ans, seuls et isolés.
    En 1950, après les défaites de la RC4 (Cao-Bang et Langson) le renseignement français avait écrit que l'infanterie viet-minh était la meilleure du monde. Il ressort de cette guerre que le fantassin Kurde de Syrie, qui est souvent une femme, est le combattant le plus efficace, hic et nunc.

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    1. @anonyme
      je suis en accord complet avec votre appréciation concernant les kurdes du Rojava, j'ajouterais même qu'il possède un réservoir inépuisable avec leurs amis du Pkk, d'autre part la diaspora Kurde installée dans le monde les soutient financièrement, les Fs Us sont présentent a leur coté le département d'état US a demandé qu'il n'y est plus d'action sur le Rojava sous peine de voir les YPD équipé de man pad sol sol et sol air, il semble que cela est été entendu puisque les Turcs frappent les YPD mais a l'ouest de l'Euphrate ceux qui tentent la connexion avec le Rojava

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    2. Raqqa est libérée de Daesh, peste inhumaine.

      Gloire d’abord aux YPG/YPJ. Nous leur devrons beaucoup. Gloire à Rojda Felat, petite femme de 37 ans environ qui aura commandé cette opération depuis à peu près un an – en effet, le premier départ de cette opération avait servi de couverture à l’opération contre Manbij. Elle aura commandé des effectifs croissants, d’abord environ 10000 combattants et sans doute 50000 au plus fort des opérations dont une bonne part (1/3 peut-être) consacrée à la logistique : alimentation, transport, protection et évacuation des civils, gestion des camps de filtrage. Il faut redire que les fameuses ONG ont été défaillantes et que l’aide américaine n’a pas même atteint une aide de premiers soins aux combattants blessés. Le poste de premier secours à Raqqa était une ancienne boutique ouverte à tous les vents. Son unique médecin témoignait qu’il ne disposait que le centième du nécessaire. Quant aux ONG, la Turquie interdit sur son sol toutes activités, y compris humanitaires, ayant pour but d’aider les Kurdes de Syrie. De plus ils subissent un blocus féroce sur leurs 3 frontières.

      Il faut insister sur leur absolu dénuement en matière d’équipement de protection, pas même un casque. Il en va autant pour l’équipement de premier secours. Une équipe européenne intégrée aux YPG a essayé de les « convertir » au garrot antihémorragique, fournissant petits bâtons et lanières découpées dans une couverture avec instruction à l’appui, sans succès apparent.

      L’avenir de Raqqa appartient à ses habitants, majoritairement arabes. Le système politique Kurde est parfaitement capable de s’y adapter, comme il le montre à Al-Tabqah et à Manbij.

      Reste le douloureux devenir des esclaves Yézidies censées se trouver à Raqqa. Jusqu’à présent le compte n’y est pas.

      Les pertes ? inconnues. Il faut attendre le bilan publié par les YPG. Cependant un rare bilan mensuel suggère une centaine de morts par mois, sans doute un maximum. Il y a quelque temps le représentant Kurde à Paris, Kendal Nezan, avait annoncé 1500 blessés pour la libération de Manbij. On peut supposer une proportion non négligeable de blessés graves par fracas des membres dû aux mines et pièges. Des vidéos de maisons de repos YPG/YPJ circulent montrant son lot d’amputés divers, hommes et femmes.

      Est-il possible de tirer quelques enseignements ? Il me semble que ces Kurdes ont mis au point des techniques d’instruction et de prise en main qui pourraient alléger sensiblement l’encadrement chez nous. L’exercice d’un commandement singulièrement décentralisé suppose une discipline totale et sans faille. Ce but semble atteint.

      On pourrait peut-être en appeler aux mânes du Maréchal de Saxe qui introduisit en France l’Infanterie légère, concepts d’équipement et de combat initiés par l’Etat-Major autrichien pour lutter contre les agressions turques sur ses confins balkaniques avec des troupes locales.
      Mais il a fallut patienter longtemps, plus de 40 ans...

      Les Forces Spéciales au contact des YPG/YPJ, qui les apprécient, auront probablement des retex passionnants.

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  10. Les lignes ont l'air de bouger à Mossoul. Peut-être grâce à une meilleure coordination, peut-être grâce à un soutien plus direct des forces de la coalition, peut-être juste parce que les combattants de Daesch restant à l'Est de la ville commencent à lâcher prise face à un adversaire plus fort en nombre et en moyens, qui a de plus la possibilité d'organiser des relèves.

    Une fois amorcée, la chute de la ville sera peut-être plus rapide que ce que ce que l'on craignait.

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    1. Le plus dur reste peut-être à venir, avec la vieille ville, située sur la rive ouest du Tigre ou les combats n'ont pas encore commencés...

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